« Environnement ça suffit », le podcast qui décrypte l’actualité environnementale.

Bienvenue dans ce premier numéro d’ « Environnement ça suffit », le podcast qui décrypte l’actualité environnementale.

https://audioblog.arteradio.com/blog/249370/podcast/250837/l-environnement-ca-suffit-episode-n-1-l-agri-velo-tour-de-biodiversite-sous-nos-pieds-premiere-partie

Pour ce premier numéro je vous propose de suivre le périple de trois membres de Biodiversité sous nos pieds, Ganaël Renault, trésorier, Anais Carrière, membre du Conseil d’administration de BSNP et moi-même durant le mois d’août 2024, dans le cadre d’un « Agrivélotour », de Crest dans la Drôme jusqu’à Paris à l’Académie du Climat : chaque jour, nous faisions une étape à vélo, ouverte au grand public pour ceux et celles qui voulaient pédaler avec nous, pour aller à la rencontre d’un agriculteur ou d’une agricultrice, afin d’évoquer avec eux la portée de la décision « Justice pour le vivant » rendue par le tribunal administratif de Paris le 29 juin 2023, qui a condamné l’Etat, sur recours de 5 associations dont BSNP, pour préjudice écologique dans l’effondrement du vivant et qui a enjoint au premier ministre de respecter la cohérence de baisse de l’utilisation des pesticides prévue par le plan Ecophyto. L’occasion d’aborder avec les agriculteurs les grandes problématiques agricoles et pas seulement les pesticides. Dans cette première partie, nous allons aller à la rencontre d’éleveurs laitiers dans le Trièves (ferme Gachet), de Florian de la ferme du Chatitet près de Bourgoin Jailleu et de Benoit, de la ferme des Jardins d’Aestiv dans l’Ain, tous deux exploitants en polyculture élevage.

[Nouveau recours] Contre la stratégie Ecophyto 2030. Des associations contestent la légalité du plan devant le Conseil d’Etat

Communiqué de presse, Paris, 13 novembre 2024 Notre Affaire à Tous, Générations Futures, Biodiversité sous nos Pieds (BSNP) et l’Association pour la Protection des Animaux Sauvages (ASPAS) ont déposé un recours en excès de pouvoir auprès du Conseil d’Etat contre le plan Ecophyto 2030 jugé illégal. En violation claire de la condamnation historique de l’Etat dans le dossier Justice Pour le Vivant, le plan Ecophyto 2030 acte un abandon de l’objectif de 50% de réduction de l’utilisation des pesticides. 

Le 4ème plan Ecophyto, “Stratégie Ecophyto 2030”, publié par le précédent gouvernement en mai 2024, après l’échec des plans précédents (1) et sous la pression des syndicats agricoles majoritaires, a introduit plusieurs changements lourds de conséquences et inconstitutionnels. 

Le Plan Ecophyto II+ fixait un objectif de réduction de 50% d’utilisation des produits phytopharmaceutiques à l’horizon 2025 par rapport à 2015 sur la base de l’indicateur NODU. La Stratégie Ecophyto 2030 garde en apparence l’objectif de réduction de 50%. Cependant, les différences sont en réalité notables. L’indicateur NODU est abandonné au profit d’un autre indicateur très différent le HRI1, la période de référence est désormais fixée à une moyenne triennale 2011-2013 et l’échéance d’atteinte de l’objectif est de nouveau reportée à 2030. Enfin, le nouveau plan introduit un principe “Pas d’interdiction sans solution”. 

Un abandon de l’objectif de réduction, contraire à la condamnation de l’État en juin 2023

Alors que ce nouveau plan a une incidence notable sur l’environnement et la santé des agriculteurs et des citoyens, il n’a fait l’objet ni d’une évaluation environnementale par le gouvernement, ni d’une procédure de participation du public. 

Pourtant les analyses des associations et experts scientifiques sont sans appel. Un changement d’indicateur et de période de référence, revient en réalité à un changement d’objectif : cela signe concrètement un abandon de l’objectif de 50% de réduction de l’utilisation de produits phytopharmaceutiques prévus dans les plans Ecophyto précédents. 

Dès lors, la Stratégie Ecophyto 2030 a été adoptée en contradiction flagrante avec les injonctions du jugement du tribunal administratif de Paris du 29 juin 2023 demandant de respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto.  De plus, elle ne comporte pas de mesures appropriées de nature à protéger des eaux souterraines contre les incidences des produits phytopharmaceutiques également requis par le TA. 

“Pas d’interdiction sans solution”, un principe inconstitutionnel et irresponsable

Les différentes régressions de la Stratégie 2030, comme le changement d’indicateur, le recul de l’objectif de diminution des usages de produits phytopharmaceutiques, mais également l’introduction d’un nouveau principe « pas d’interdiction sans solution » viennent a minima conforter une utilisation des produits phytopharmaceutiques particulièrement nuisible pour l’environnement et la santé humaine. Elles portent ainsi atteinte au principe de précaution, de non-régression et aux droits des générations futures. Selon le Conseil constitutionnel, « le législateur doit veiller à ce que les choix destinés à répondre aux besoins du présent ne compromettent pas la capacité des générations futures […] à satisfaire leurs propres besoins » (2).

En France, troisième pays européen en termes de nombre de produits phytopharmaceutiques autorisés, le coût environnemental, sanitaire et sociétal du recours massif aux pesticides de l’agriculture est élevé et n’est plus à démontrer :

  • La contamination de l’environnement par les pesticides est identifiée comme l’une des causes de l’effondrement de la biodiversité qui met en danger notre sécurité alimentaire.
  • Les études concernant l’impact des pesticides sur la santé des travailleurs et des riverains montrent l’existence de liens forts entre l’exposition aux pesticides et notamment des cancers et des maladies neurodégénératives (3). Le nombre de reconnaissances de maladie professionnelle pour des agriculteurs exposés est en croissance exponentielle.
  • En Europe, une étude du bureau d’étude indépendant Basic chiffre les coûts sociétaux attribuables à l’utilisation des pesticides de synthèse dans l’Union Européenne à 2,3 milliards d’euros en 2017. Toujours selon cette étude, les coûts sociétaux attribuables à l’utilisation des pesticides de synthèse en agriculture à l’échelle européenne sont 2,44 fois plus élevés que le bénéfice direct tiré des pesticides de synthèse par leurs fabricants. 

A l’heure où les agriculteurs se mobilisent, il est fondamental de rappeler qu’abandonner les réglementations environnementales ne résoudra en rien les problèmes des agriculteurs. Notre dépendance aux substances de synthèse met en péril notre sécurité alimentaire et pèse sur la viabilité des exploitations. En perpétuant leur usage dans le secteur agricole, le gouvernement compromet les efforts visant à promouvoir des modèles plus durables et moins coûteux d’un point de vue sanitaire et environnemental. »

déclarent les représentants des ONG requérantes.

Notes

(1) Cour des comptes, 27 septembre 2019; rapport du Conseil Général de l’environnement et du développement durable (CGEDD), mars 2021.

(2) Conseil constitutionnel, 27 octobre 2023, n° 2023-1066 DC. Le Conseil Constitutionnel a par ailleurs affirmé que les objectifs de valeur constitutionnelle de protection de la santé et de l’environnement pouvaient justifier une atteinte à la liberté d’entreprendre (31 janv. 2020, no 2019-823 QPC).

(3) INSERM, « Pesticides et effets sur la santé » de 2013, actualisée en 2021.

Contacts presse

Marine Coynel, chargée de communication de Notre Affaire à Tous : marine.coynel@notreaffaireatous.org

Dorian Guinard, porte-parole de Biodiversité Sous Nos Piedsbiodiversitesousnospieds@gmail.com

François Veillerette, porte-parole de Générations Futures : francois@generations-futures.fr

Pesticides : un an de refus manifeste du gouvernement d’exécuter la décision de « Justice pour le Vivant »

Le 29 juin 2023, dans le cadre de Justice pour le Vivant, le tribunal administratif de Paris condamnait le gouvernement à prendre, avant le 30 juin 2024, toutes les mesures nécessaires pour réduire l’usage des pesticides en France et protéger les eaux souterraines du pays. La juridiction reconnaissait également le préjudice écologique résultant des pesticides et l’existence de failles significatives dans l’évaluation de leurs risques avant autorisation. Depuis sa condamnation, le gouvernement refuse ouvertement d’exécuter la décision de justice et n’a fait que reculer. Quel que soit le résultat du second tour des élections législatives, les ONG continueront leur action en justice pour veiller à ce que le prochain gouvernement agisse pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.

Le 29 juin 2023, dans un jugement historique, le Tribunal administratif de Paris reconnaissait, pour la première fois, l’existence d’une contamination généralisée de l’environnement par les pesticides, causant un effondrement de la biodiversité .

Constatant également des failles dans les procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, le tribunal condamnait le gouvernement à, d’ici au 30 juin 2024 :

  • Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ;
  • Protéger réellement , comme la loi l’oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leurs résidus

Si le gouvernement a fait appel de ce jugement, tout comme les cinq ONG qui cherchent à l’obliger à combler les failles de l’évaluation des risques, la condamnation doit être appliquée et l’État est donc tenu d’agir. Pendant les 12 mois qui ont suivi l’annonce de ce jugement, le gouvernement n’a pourtant rien fait, ni pour se plier au jugement, ni pour agir contre le préjudice écologique qui touche les citoyens français, pourtant reconnus.

« Depuis sa condamnation pour sa mauvaise gestion des pesticides il y a un an, le gouvernement n’a proposé que renoncement sur renoncement. En changeant l’indicateur principal du plan Ecophyto 2030, il abandonne les ambitions de réduction des plans précédents qu’il a pourtant été condamné à respecter. Sur la question de l’eau, il n’a rien fait non plus, alors que la pollution des eaux souterraines aux pesticides a des conséquences tant sur les écosystèmes que sur les collectivités »

dénoncent les associations, qui se réservent la possibilité de saisir le tribunal pour demander l’exécution du jugement.

Le changement d’indicateur prévu par le plan Ecophyto 2030 – du NODU à HRI1 – ne pourra pas servir à mesurer de diminution réelle de l’usage des pesticides. Il a pour seul objectif de permettre au gouvernement d’afficher un respect de ses engagements, sans entraîner de baisse effective, et sans enrayer l’effondrement de la biodiversité.


Bien qu’il n’ait pas été expressément condamné à le faire, le gouvernement aurait aussi pu combler les failles de l’évaluation des risques des pesticides, identifiées par les autorités compétentes et reconnues par le Tribunal – qui a également reconnu un lien de causalité directe avec le préjudice écologique. Il est de la responsabilité de l’État d’agir sur ce point comme le souligne un récent arrêt (C-308/22) de la Cour de Justice de l’Union européenne, selon lequel l’État ne peut se contenter d’une évaluation des risques qui ne tient pas compte « des données scientifiques disponibles les plus fiables ainsi que des résultats les plus récents de la recherche internationale ». La coalition Justice pour le vivant estime qu’il est temps que l’Etat remette la science au cœur de l’évaluation des risques des pesticides.


« Le nombre d’insectes volants a chuté de près de 80% en 30 ans, pendant que la quantité d’oiseaux des champs a baissé de 60% en Europe. Alors qu’il est urgent d’agir et qu’il a toutes les clés en main pour le faire, le gouvernement a choisi de reculer, et de privilégier les profits de l’agro-industrie au détriment du plus grand nombre. Une transition vers un modèle agroécologique ne se fera pas sans changements politiques profonds et un abandon de l’usage massif de pesticides. » expliquent les associations. « Quels que soient les résultats du 2d tour des élections législatives, les ONG de Justice pour le Vivant continueront leur action en justice pour obliger l’État à prendre ses responsabilités et agir contre l’effondrement de la biodiversité. »


Sources

Sur la pollution des eaux :

Service public d’information sur l’économie de l’eau : https://economie.eaufrance.fr/chiffres-cles/cout-minimal-quengendrerait-une-depollution-des-eaux-souterraines

Sur l’effondrement de la biodiversité : 

Victoire dans le contentieux de Megève : la restructuration du secteur de Rochebrune est suspendue !

En octobre 2022, avec FNE 74, nous avions déposé une requête en annulation, doublée d’une requête en suspension contre le réaménagement du secteur de Rochebrune dans la station de ski de Megève. En novembre 2022, le juge des référés de Grenoble a rejeté notre requête en suspension. Le 8 avril 2024, le Conseil d’État a annulé cette décision et a renvoyé l’affaire devant le Tribunal Administratif de Grenoble. Le 14 mai 2024, le tribunal administratif de Grenoble a suspendu les travaux et l’arrêté préfectoral pour urgence caractérisée et doute sérieux concernant la raison d’impérative d’intérêt public majeur.

Les travaux préparatoires de terrassement et de génie civil avait été achevés et le défrichement déjà réalisé pour près de 90% de la surface autorisée avant la première audience en 2022. Le juge des référés avait alors argumenté que la condition d’urgence n’était pas satisfaite, ce que le Conseil d’État a remis en cause. Le TA de Grenoble, suite à la censure de son ordonnance pour erreur de droit par le Conseil d’État, a finalement suspendu les travaux sur la surface restant à défricher d’environ 13 000 m².

Une nouvelle décision qui vient confirmer que la destruction des espèces protégées ne peut être justifiée par des impératifs économiques de court terme dans les stations de ski. Nous attendons désormais l’audience pour le jugement au fond.

Pour rappel

Cette restructuration inclut le remplacement de deux télésièges et deux téléskis par deux télésièges débrayables et un téléski, créant par ailleurs une nouvelle piste de ski et des réseaux de neige au niveau de cette nouvelle piste. Elle va avoir pour effet de détruire 46 espèces protégées : onze espèces de mammifères, trente espèces d’oiseaux, cinq espèces de reptiles et d’amphibiens.

La rentabilité économique est basée sur un impact quasi inexistant du réchauffement climatique sur la localité de Megève, ce qui est évidemment en contradiction avec toutes les publications scientifiques relatives aux conséquences du réchauffement climatique sur les Alpes. La station de Megève, compte tenu des altitudes de son front de neige (1113 m – 2014 m), va être exposée à un enneigement significativement plus faible qu’actuellement, entraînant des conflits d’usage de l’eau.

Le tribunal administratif de Grenoble conclut ainsi :

“ […] la dérogation a été accordée en l’absence de raison impérative d’intérêt public majeur et donc en violation des dispositions de l’article L. 411-2 du code de l’environnement paraît propre à créer, en l’état de l’instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée “.

« l’atteinte aux intérêts qu’entend défendre les associations requérantes est donc suffisamment grave et immédiate pour que la condition d’urgence soit satisfaite […] “

Télésiège

Victoire dans le contentieux de Megève : une avancée jurisprudentielle dans la préservation des espèces protégées

Dans le cadre du recours qui oppose Biodiversité sous nos pieds et FNE 74 à la préfecture de Haute Savoie et la mairie de Megève (https://biodiversitesousnospieds.fr/actionsjustice/station-de-ski-de-megeve/ ), le Conseil d’Etat a rendu une décision importante tant pour la suite de cette affaire que pour le contentieux des espèces protégées en général.

Suite au rejet le 16 novembre 2022 du référé-suspension par la Tribunal de Grenoble pour défaut d’urgence car l’état d’avancement des travaux (forêt détruite à 90%) ne permettait plus de caractériser l’urgence, notre association avait introduit un recours en cassation devant le Conseil d’Etat contre l’ordonnance du Tribunal. Le Conseil d’Etat s’est prononcé le 8 avril 2024, et a fait droit à l’argumentaire de BSNP (qui a obtenu l’aide juridictionnelle sur ce dossier) en relevant ainsi qu’  » en se bornant à relever l’état avancé des travaux, alors que l’argumentation dont il était saisi lui imposait d’examiner si l’impact des travaux restant à effectuer sur les espèces protégées pouvait conduire à regarder la condition d’urgence comme remplie, le juge a commis une erreur de droit« .

Cette décision – qui constitue une avancée jurisprudentielle dans la protection des espèces protégées – chasse dès lors de possibles tentations de « fait accompli » : tant qu’il reste un habitat ou une espèce protégée à préserver, le juge administratif doit analyser les impacts potentiels des travaux pour caractériser l’urgence. Le Conseil d’Etat casse la décision du TA et renvoie au juge de Grenoble pour une nouvelle audience – date à déterminer – pour rejuger de la suspension éventuelle des travaux.

Justice pour le Vivant : en appel, les ONG demandent au juge d’obliger l’Etat à améliorer l’évaluation des risques des pesticides

Le 20 novembre 2023, les ONG de Justice pour le Vivant ont transmis leurs arguments à la cour administrative d’appel de Paris dans leur mémoire complémentaire. Elles entendent prouver la nécessité de revoir la méthodologie de l’évaluation des risques des pesticides et obliger l’Etat à agir sur ce point afin de lutter efficacement contre l’effondrement de la biodiversité.

Les ONG portant le recours Justice pour le Vivant, POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, l’ASPAS et ANPER-TOS ont déposé leur mémoire complémentaire, après avoir fait appel d’une partie de la décision. Elles souhaitent compléter la victoire partielle obtenue lors du jugement en première instance et obliger l’Etat à corriger les failles de la méthodologie d’évaluation des risques des pesticides, préalable indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité en France.

Le 29 juin dernier, le tribunal administratif avait rendu une décision historique en reconnaissant pour la première fois le préjudice écologique lié à l’effondrement de la biodiversité causé par les pesticides. Il a également condamné l’Etat à renouer avec les objectifs des plans Ecophyto d’ici le 30 juin 2024 et à respecter les obligations de protection des eaux souterraines. Cependant, et bien qu’une carence de l’Etat ait été reconnue à ce sujet, les ministères visés n’ont pas été condamnés à combler les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides. C’est pour obtenir une victoire sur cet élément central que les ONG ont décidé de faire appel.

« Le gouvernement peut proposer de nouveaux plans Ecophyto… S’il ne revoit pas l’évaluation des risques des pesticides, il n’arrêtera pas l’effondrement en cours de la biodiversité, et les objectifs drastiques de réduction resteront, comme depuis 2018, des promesses non tenues, déclarent les associations. Face à l’ampleur de l’effondrement de la biodiversité, il est urgent d’agir et de corriger les failles reconnues par le tribunal en première instance. »

La reconnaissance des failles de l’évaluation des risques lors du jugement en première instance n’a pour le moment pas entraîné de réaction de l’Etat, qui a également fait appel de la décision. Rejetant l’ensemble du jugement, le gouvernement se refuse à agir et persévère dans son déni de responsabilité. L’appel de la décision n’étant pas suspensif, il est cependant toujours tenu de renouer avec les objectifs définis par les plans Ecophyto d’ici le 30 juin 2024.

L’IMPORTANCE DE REVOIR L’ÉVALUATION DES RISQUES DES PESTICIDES

Il existe bel et bien un lien de causalité direct et certain entre le déclin de la biodiversité et les failles de la procédure d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides. De nombreuses études scientifiques1 permettent d’établir l’existence de toute une série d’effets des pesticides – chroniques, sublétaux, indirects, cocktails, etc. – et de voies d’exposition qui ne sont pas, ou pas suffisamment, pris en compte par l’Anses dans le cadre de l’évaluation des risques. Ces mêmes études démontrent pourtant l’ampleur que ces effets peuvent avoir sur la survie des populations d’espèces non ciblées par les pesticides. Obliger l’Etat à agir sur ce point est indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité en cours.

Une évaluation adéquate des risques permettrait nécessairement de mieux déterminer la toxicité des pesticides avant toute mise sur le marché et de mieux gérer les risques associés :

  • Une tribune publiée le 12 octobre dans le Monde par un collectif de chercheurs, dont Céline PELOSI, directrice de recherche à l’INRAE, dénonçait par exemple les effets délétères du glyphosate sur l’ADN et la reproduction des vers de terre, et l’inadéquation des tests menés pour évaluer ces risques, dans le cadre du renouvellement de l’autorisation de l’herbicide.
  • Le cas de l’évaluation des effets des néonicotinoïdes sur les abeilles est particulièrement révélateur de l’importance de mener une évaluation adéquate des risques. C’est seulement parce qu’à titre exceptionnel, les autorités réglementaires françaises et européennes ont pris en compte des tests supplémentaires par rapport à ceux prévus par les procédures d’évaluation en vigueur, que leurs effets délétères pour les abeilles, jusqu’alors ignorés, ont pu être mis en évidence et pris en compte. Ce précédent montre comment une meilleure évaluation des risques peut conduire à l’identification et à l’interdiction de produits responsables de l’extinction de la biodiversité.

Communiqué de presse / T3 de La Grave : recours citoyen contre le passage en force de la SATG

Alors même que la présence d’une espèce protégée rare a été constatée sur le site du projet de 3e tronçon du téléphérique de la Grave, la SATG est sur le point de lancer les travaux. Un passage en force que les associations de protection de l’environnement dénoncent et vont contrer par une nouvelle action en justice.

Rotations d’hélicoptères, présence sur le rognon rocheux, piétinement et destruction d’habitat naturel d’intérêt communautaire… Tout laisse à penser que la Société d’Aménagement Touristique de la Grave (SATG) lance les travaux d’implantation du troisième tronçon du téléphérique de La Grave, situé à 3300m sur le glacier de La Girose, avant le jugement sur le fond par le Tribunal Administratif de Marseille prévu en 2024.

Mountain Wilderness France, La Grave Autrement, la Société Alpine de Protection de la Nature – France Nature Environnement 05, FNE PACA, FNE AURA, la LPO PACA et Biodiversité sous nos pieds, déposent aujourd’hui un référé liberté visant la suspension immédiate des travaux menés par la SATG.

La révélation de la présence de l’Androsace du Dauphiné, espèce protégée au niveau national, sur le rognon rocheux par l’Office Français de la Biodiversité (OFB) et le laboratoire d’écologie alpine du CNRS (Univ. Grenoble Alpes, Univ. Savoie Mont-Blanc) a conduit nos associations à demander au Préfet des Hautes-Alpes, en conformité avec la loi sur les espèces protégées, de conditionner le démarrage des travaux à l’octroi d’une dérogation pour destruction d’espèces protégées. Celui-ci n’a plus que quelques jours pour répondre à notre demande ; sans attendre, la SATG veut passer en force et démarrer les travaux, ce qui provoquerait un risque caractérisé de destruction de l’Androsace et des dommages irréversibles sur cet environnement refuge pour d’autres espèces menacées par le changement climatique.

En parallèle de leurs actions devant les tribunaux, nos associations appellent tous les habitants et citoyens à se mobiliser pour faire stopper ces travaux, symbole de la poursuite déraisonnée d’un modèle aménagiste qui détruit notre écosystème depuis de trop nombreuses années. Alors que tous les voyants sont au rouge, pouvons-nous encore nous permettre ces projets obsolètes, coûteux, et profondément hors-sol ?

Il existe d’autres voies pour nos montagnes. À la Grave, un travail collectif pour un projet alternatif est en cours. Une alternative qui concilie montagne à vivre et montagne sauvage, qui permet de penser le territoire dans sa globalité, au-delà du “tout-tourisme”.


LES SIGNATAIRES

Communiqué de presse / Justice pour le Vivant : les ONG font appel pour obliger l’État à agir

Les 5 ONG environnementales de Justice pour le Vivant ont fait appel d’une partie du jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 29 juin dernier, afin d’obliger l’État à combler les failles des méthodes d’évaluation des risques des pesticides, reconnues de manière historique dans le premier verdict. L’État, condamné à respecter les objectifs des plans Ecophyto et à mieux protéger ses eaux, a lui-même fait appel de la décision, s’enfermant dans un refus d’agir pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.

Dans sa décision du 29 juin dans le cadre de Justice pour le Vivant, l’action menée par POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, le tribunal administratif de Paris a reconnu pour la première fois l’existence d’un préjudice écologique résultant d’une contamination généralisée de l’eau, des sols et de l’air par les pesticides, ainsi que la faute de l’État français dans cette situation. Il a été condamné à prendre les mesures nécessaires pour respecter les objectifs des plans Ecophyto et pour protéger les eaux souterraines du pays.

Les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides ont également été reconnues par le tribunal, mais la juridiction n’a pas contraint l’État à agir sur ce point. Considérant que la révision du processus d’homologation des pesticides est la condition sine qua none d’une réduction systémique et urgente de l’utilisation des pesticides en France, les 5 ONG de Justice pour le Vivant ont fait appel de cette partie de la décision, en déposant une requête devant la cour administrative d’appel de Paris le 29 août 2023. Elles cherchent à obtenir un changement concret des méthodes d’évaluation des risques des pesticides, préalable indispensable pour enrayer l’effondrement de la biodiversité.

« Dans sa décision de juin, le tribunal pointe clairement du doigt les failles de l’évaluation des risques des pesticides et leurs conséquences délétères sur le Vivant. Plutôt que d’en tirer les conséquences évidentes, les Ministres s’enferment dans un refus d’agir en faisant appel. Face à l’extrême urgence de la situation, notre appel vise à empêcher l’État de perdre plus de temps dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité. »

expliquent les ONG.

Face à sa condamnation et à la reconnaissance historique de sa responsabilité dans l’effondrement de la biodiversité, l’État a lui aussi fait appel du jugement rendu.

L’appel n’étant pas suspensif, l’État doit toujours, d’ici le 30 juin 2024 :

  • Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ;
  • Protéger réellement, comme la loi l’y oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leur résidus.

« C’est une véritable fuite en avant : même lorsque la justice le met devant le fait accompli et le condamne, l’État s’enferme dans l’inaction. En refusant de revoir sa gestion des pesticides, il refuse de protéger ses citoyens et l’ensemble du Vivant sur le territoire français. »

dénoncent les ONG.

Dans le cadre de ces appels, Phyteis, qui était intervenu aux côtés de l’État et avait défendu les Ministères concernés, non représentés lors de l’audience, pourrait de nouveau demander à intervenir dans cette nouvelle étape du recours Justice pour le Vivant.

Communiqué de presse / Pesticides et effondrement de la biodiversité : un jugement historique condamne l’Etat français

Paris, le 29 juin 2023. Le Tribunal administratif de Paris a rendu un verdict historique dans le cadre du recours Justice pour le Vivant qui oppose 5 ONG environnementales à l’Etat et Phyteis, le lobby de l’agrochimie en France. La justice reconnaît pour la première fois la responsabilité de l’Etat dans l’effondrement du Vivant, et ses insuffisances dans l’évaluation des risques des pesticides.

Cette journée marque un tournant dans la lutte contre l’effondrement de la biodiversité en France. Alors que l’on constate un déclin de 76 % à 82 % des insectes volants au cours des 27 dernières années en Europe [1], une diminution de 57 % des oiseaux des milieux agricoles depuis 1980[2], le jugement rendu aujourd’hui par le Tribunal administratif reconnaît, pour la première fois, l’existence d’un préjudice écologique résultant d’une contamination généralisée de l’eau, des sols et de l’air par les pesticides et de l’effondrement du vivant et la faute de l’Etat français dans cette situation. 

Le tribunal reconnaît les failles des procédures d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des pesticides, démontrées par les associations, et juge que ces failles relèvent de la responsabilité directe de l’Etat. Il reconnaît également un lien de causalité direct entre les insuffisances de l’évaluation des risques et le déclin de la biodiversité. 

Le tribunal n’ordonne toutefois pas à l’Etat de revoir les méthodologies d’évaluation des risques – contrairement à ce que préconisait la rapporteure publique, estimant qu’il ne peut être établi juridiquement avec certitude qu’une meilleure évaluation permettrait de « modifier significativement la nature ou le nombre [des pesticides] mis sur le marché ». Sur ce dernier point, les associations feront appel devant la Cour administrative d’appel de Paris, et introduiront, en parallèle, un nouveau recours devant le Conseil d’Etat pour obtenir la mise en œuvre de cette décision.

Le tribunal donne par ailleurs à l’État jusqu’au 30 juin 2024 pour : 

  • Prendre toutes les mesures utiles pour respecter les objectifs de réduction des pesticides prévus par les plans Ecophyto ; 
  • Protéger réellement, comme la loi l’y oblige déjà, les eaux souterraines du territoire français des effets des pesticides et de leur résidus

«  La justice a tranché : après des décennies d’inaction, l’Etat est enfin reconnu coupable de l’effondrement de la biodiversité par son incapacité à mettre en œuvre une évaluation des risques des pesticides réellement protectrice du Vivant. Mais c’est aussi sa capacité à agir et la possibilité de renverser cette situation dramatique que cette décision met en lumière. Les solutions pour inverser la tendance existent, il faut les mettre en place de toute urgence. » commentent les associations.

La responsabilité de l’Etat et le préjudice qui en résulte, est caractérisé par : une contamination généralisée, diffuse, chronique et durable des sols et des eaux par les pesticides ; le déclin de la diversité et de la biomasse de nombreuses espèces (pollinisateurs et autres insectes, amphibiens, reptiles, oiseaux, organismes aquatiques, vers de terre, ainsi que de nombreuses autres espèces composant la faune et la flore terrestre et aquatique) ; et, plus généralement, la détérioration des chaînes trophiques et de l’ensemble des écosystèmes indispensables à la vie humaine, animale et végétale. 

POLLINIS, Notre Affaire à Tous, Biodiversité sous nos pieds, ANPER-TOS et l’ASPAS, les 5 ONG environnementales du collectif Justice pour le Vivant, ont fait des propositions fondées sur la science pour faire évoluer les méthodologies d’évaluation des pesticides avant leur mise sur le marché. 

Face à la gravité de la situation, elles appellent d’ores et déjà le gouvernement à prendre ses responsabilités. Il doit revoir d’urgence les procédures d’évaluation des risques, réévaluer la dangerosité des près de 3 000 produits phytopharmaceutiques homologués en France [4], retirer du marché les substances problématiques, et s’assurer que de nouvelles substances toxiques pour le vivant n’y fassent pas leur entrée. 

Les ONG se tiennent à la disposition des ministres concernés, des parlementaires souhaitant comprendre les implications de cette condamnation pour les prochains projets de loi de planification agricole et solliciteront l’ANSES pour lui présenter des solutions rapidement déployables.

« Il s’agit d’une première étape indispensable pour enrayer l’extinction en cours. Face à l’urgence de la situation, L’Etat peut et doit maintenant mener les transformations nécessaires rapidement, en s’appuyant sur la science indépendante et de manière transparente », rappellent les associations.

Le jugement complet est disponible ici

Sources

[1] Cour des comptes, Le soutien à l’agriculture biologique, Rapport public thématique, juin 2022, p. 203

[2] Birdlife International, Etat des Populations d’Oiseaux dans le Monde, 2022

[3] Rigal, S et al. PNAS, Farmland practices are driving bird populations decline across Europe2023. https://www.pnas.org/doi/10.1073/pnas.2216573120
[4] ephy.anses.fr

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Justice pour le vivant : la rapporteure publique souligne les carences fautives de l’Etat français

Photo de couverture : Des représentants des associations requérantes devant le Tribunal administratif de Paris. © Paloma Moritz

C’est ce jeudi 1er juin que s’est tenue, au Tribunal administratif de Paris, l’audience du recours Justice pour le vivant porté par cinq associations de défense de l’environnement (NAAT, Pollinis, Biodiversité sous nos pieds, ASPAS, Anper-TOS) contre l’Etat français.

Pour mémoire, cette action en justice a vocation à faire reconnaître la reponsabilité de l’Etat dans l’effondrement en cours d’une partie de la biodiversité dont l’une des causes premières, comme le révèlent les études scientifiques, est l’utilisation massive des produits phytopharmaceutiques. Les carences de l’Etat soulevées par les associations concernaient notamment les protocoles d’évaluation et d’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques, insuffisants pour ne pas engendrer d’effets inacceptables sur l’environnement.

À l’issue d’une longue procédure juridique au cours de laquelle l’organisation professionnelle Phyteis regroupant l’ensemble des acteurs de l’industrie agrochimique (Bayer, Syngenta…) est venue apporter son soutien à l’Etat et d’une audience marquée par l’absence de représentants de l’Etat, la défense étant assurée excusivement par l’avocat de Phyteis, la rapporteure publique a rendu ses conclusions.

Elle tend à donner raison aux associations requérantes et propose au tribunal de condamner l’Etat, notamment pour son manquement au principe de précaution, reconnaissant ainsi des failles dans les procédures de délivrance des autorisations de mise sur le marché des pesticides.

La rapporteure publique souligne également les manquements de l’Etat concernant ses engagements de réduction de l’utilisation des pesticides sur son territoire dans le cadre des plans Echophyto ainsi que le préjudice écologique causé par l’utilisation massive des pesticides générant une pollution diffuse des sols et des eaux.

La décision du Tribunal administratif de Paris sera rendue publique le 15 juin prochain.